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La raffinerie de pétrole d’Aliko Dangote est bien partie pour devenir un modèle à suivre en Afrique (rapport)

La raffinerie de pétrole d’Aliko Dangote est bien partie pour devenir un modèle à suivre en Afrique (rapport)
  • Date de création: 03 mai 2024 07:30

(Agence Ecofin) - La nouvelle raffinerie de pétrole d’Aliko Dangote au Nigeria, dotée de technologies avancées et d'une capacité de 650 000 barils par jour, promet de revitaliser l'industrie africaine du raffinage. Cette installation moderne, comparée aux autres raffineries sous-performantes du continent, a été conçue pour l'efficacité et la rentabilité.

La nouvelle raffinerie de pétrole du milliardaire nigérian Aliko Dangote porte les espoirs de renaissance de l’industrie africaine du raffinage qui fait face à des difficultés opérationnelles et financières depuis plusieurs années, grâce notamment à sa taille critique, sa politique d’approvisionnement diversifiée et ses outils de production intégrant des technologies de pointe, souligne un rapport publié le 4 avril dernier par Ecofin Pro, la plateforme de l’agence Ecofin dédiée aux professionnels.

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Intitulé « Pourquoi la raffinerie pétrolière d’Aliko Dangote peut réussir là où les autres raffineries africaines ont échoué », le rapport rappelle que le point commun entre les raffineries pétrolières en Afrique est qu’elles fonctionnent globalement bien en deçà de leurs capacités réelles. Le phénomène est plus frappant en Afrique subsaharienne où en 2022, les usines qui pouvaient en théorie traiter jusqu’à 1,4 million de barils de pétrole par jour, ont affiché un taux d’utilisation de moins de 30 % de cette capacité.

Cela s’explique en premier lieu par des difficultés d’approvisionnement qui découlent essentiellement du coût d’achat du brut, dont la volatilité s’est accrue au cours des dernières années.

Les raffineurs, qui n’ont que peu ou pas de contrôle sur le prix de leurs intrants, ont d’ailleurs vu leurs marges bénéficiaires fondre. D’après les calculs du cabinet de conseil sur l'énergie et les métaux Wood Mackenzie, la marge combinée de l’industrie mondiale du raffinage a été en moyenne de 1,80 dollar par baril, soit moins de la moitié de la moyenne de la période 2015-2019, qui s’était établie à de 4,25 dollars par baril.

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Les difficultés d’approvisionnement s’expliquent accessoirement par les engagements des pays producteurs vis-à-vis des acheteurs. Il arrive que, contraints par des engagements préalables de livraison de brut, les producteurs africains n’arrivent pas à satisfaire les besoins des raffineries présentes sur leurs territoires. C’est notamment le cas du Nigeria, qui exporte son brut vers les États-Unis, l’Europe ou l’Inde et importe plus de 80 % de ses besoins en produits pétroliers depuis les Pays-Bas et la Belgique.

Absence d’économies d’échelle

Les mauvaises performances des raffineries africaines trouvent également leur origine dans des difficultés d’ordre opérationnel liées à la mauvaise maintenance des outils de production basés sur des technologies peu évoluées, à la faiblesse de l’approvisionnement en brut et à une main d’œuvre pas suffisamment qualifiée.

La maintenance et la modernisation des raffineries sont affectées par la faiblesse des capacités d’ingénierie et de construction dans de nombreux pays africains. En outre, la quasi-totalité du matériel et des équipements doit être importée.

Les raffineries de pétrole africaines sont d’autre part confrontées à des défis de rentabilité découlant de leurs faibles capacités, qui vont généralement de 10 000 à 210 000 barils par jour. Selon l’expert et analyste au sein de l’Institut pour la sécurité énergétique du Ghana, Paa Kwasi Anamua Sakyi, les économies d’échelle jouent un rôle crucial dans la détermination de la rentabilité des raffineries. En effet, elles permettent de répartir plus aisément les charges d’exploitation fixes tels que l’entretien, la main-d’œuvre, l’assurance, l’administration ainsi que la dépréciation des devises sur un plus grand volume de production. Ainsi, les installations dotées de plus grandes capacités de raffinage sont plus efficaces, mieux équipées pour faire face aux fluctuations de l’activité, et donc plus rentables.

Les gouvernements africains et les investisseurs locaux n’ont pas par ailleurs réussi à combler le vide laissé par certaines grandes compagnies occidentales qui se désengagent de plus en plus du secteur des énergies fossiles pour réduire leur empreinte carbone, ce qui a entraîné un manque chronique d’investissements dans la modernisation des installations de raffinage.

Sur un autre plan, les résidus de brut qui constituent un important pôle de revenus pour les raffineries posent souvent problème en Afrique. En effet, ils sont généralement exportés à perte, si tant est qu’ils puissent l’être. La plupart des raffineries ne disposent pas d’installations de valorisation des résidus et, pour elles, le seul moyen d’optimiser la production de ces résidus est de sélectionner soigneusement le brut.

Des technologies numériques de dernière génération

Le rapport élaboré par notre confrère Olivier de Souza note dans ce cadre que la raffinerie d’Aliko Dangote, qui a commencé à produire du carburant en janvier 2024, pourrait réussir là où les autres ont échoué, grâce à plusieurs avantages comparatifs.

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Il s’agit en premier lieu de sa taille critique, avec une capacité de traitement de 650 000 barils par jour qui permet d’atteindre la rentabilité grâce aux économies d’échelle.

L’autre force de la raffinerie installée dans la zone industrielle de Lekki à Lagos réside dans sa politique d’approvisionnement intelligente et diversifiée. Alors que des accords d’approvisionnement ont été signés entre le groupe Dangote et la compagnie pétrolière nationale NNPC pour alimenter la raffinerie en brut, les responsables de l’usine en ont également signé avec des producteurs américains. Ils ont expliqué que le but de ce second deal est de déterminer les meilleures options garantissant le fonctionnement à long terme et le succès financier de la raffinerie Dangote. D’autant plus qu’il existe des risques pour que le Nigeria ne puisse pas alimenter la raffinerie dans les proportions prévues par l’accord. En effet, la production du pays ne cesse de reculer ces dernières années passant de plus de 2 millions de barils par jour en 2016, à 1,4 million de barils par jour aujourd’hui. Les actes de vandalisme, de vol de pétrole et les attaques sur les installations pourraient avoir un effet négatif sur la production nationale, mettant en péril l’approvisionnement de la raffinerie.

La raffinerie de Dangote est par ailleurs une véritable prouesse d’ingénierie et l’un des meilleurs exemples de la digitalisation dans l’industrie pétrolière, alors que la majorité des raffineries africaines s’appuient encore des technologies inefficaces et une main d’œuvre peu qualifiée. La nouvelle installation intègre les technologies numériques de dernière génération telles que l’Internet des Objets (IoT), les outils de collecte et de stockage de données dans le cloud, ainsi que l’intelligence artificielle (IA) et les modèles de Machine Learning pour leur traitement.

Et last but not least, la raffinerie de 19 milliards de dollars bénéfice d’une conception intégrée avec des infrastructures de stockage et de transport bien pensées, un terminal maritime complet et des équipements de manutention du brut et des produits dérivés. 

Grâce à ces avantages, le complexe de raffinage pétrolier d’Aliko Dangote devrait non seulement répondre à la demande intérieure du Nigeria en produits pétroliers, mais aussi générer des excédents pour l’exportation. Il est également bien positionné pour devenir un modèle pour une industrie de raffinage plus moderne, efficace et durable en Afrique.